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1968, le RCMT, alors équipe phare de Toulouse se prend les pieds dans le tapis et descend en deuxième division nationale. Pour autant, la ville rose reste représentée pour la saison à venir grâce au Toulouse Université Club, tout juste promu. Les Tucistes vont vivre une seule saison au plus haut niveau, où ils seront loin d'être ridicules grâce à l'apport de leur talentueux américain William Davis. Celui-ci, fort scoreur va se hisser à la première place des meilleurs marqueurs du championnat de France et marquer de son empreinte cette compétition.

 La saison du Toulouse Université Club au sein de l'élite nationale n'aura pas toujours été de tout repos, avec une 11ème place sur 12 équipes engagées cette saison 1968-1969. Pour autant, le public s'est souvent déplacé au Pré-Catalan pour assister aux exploits du pivot américain William Davis, la bonne pioche du Dr Nichil, président du club universitaire.

 

 

Tout juste sorti de l'Université d'Arizona, le jeune William Davis, 22 ans, promène sa longue carcasse (2m01, 80 kgs) sur le campus universitaire de Toulouse. Il est venu apprendre le français et suit des cours d'histoire. A cette époque, l'amateurisme est encore de rigueur, bien que les joueurs étrangers commencent à alimenter les effectifs des équipes de haut niveau.

 

 

Dans le Guide du basket édité en 1988, Didier Le Corre précise que cette saison est un tournant: "S'ils n'étaient que 4 joueurs américains en 1967-68, ils seront 16 l'année suivante! L'ouverture des frontières vient d'être donnée, et seuls deux clubs, l'ASVEL (qui remportera le titre) et Bagnolet, n'en aligneront pas. La moitié des équipes en présentent même deux. Mieux encore, ils seront trois à Caen, puisque Dennis Hrcka entrera de temps en temps à la place de Leroy Johnson ou Frank Jackson. Le basket français négocie un grand virage".

 

 

Bien que le TUC ne présente qu'un seul étranger, celui-ci est une recrue d'importance non seulement par sa taille, mais aussi par sa mobilité. Joueur ailier à l'Université d'Arizona, l'étudiant américain va évoluer dans la ville rose au poste de pivot. Comme le Dr Nichil le précise à la Dépêche du Midi en septembre 1968, "les américains n'ont pas la même conception que nous en ce qui concerne les pivots et leur jeu. Ils n'ont pas de tour de contrôle. Le rythme rapide du basket US oblige les pivots à savoir tout faire. Et ils le font."

 

 

Il est cependant bien réducteur de ne pas mettre en avant les autres joueurs de l'effectif, dont certains ont déjà un CV bien rempli. Outre William Davis, le TUC présente quelques joueurs chevronnés comme André Souvré et André Michi, tous deux anciens joueurs du Paris Université Club, champions de France et vainqueurs de la Coupe de France en 1962 notamment. On retrouve également Paul Salmeron, capitaine et entraineur-joueur et son frère Roland ou encore Jean Simon.

Néanmoins, les Tucistes sont conscients de l'ampleur de la tâche, et comme le précise Paul Salmeron, "je ne sais absolument pas si le TUC se maintiendra à la fin de cette saison en division I. Je ne peux même pas me baser sur les résultats de l'an dernier, puisque toutes les équipes se sont renforcées avec des étrangers".

 

 

Le TUC doit en plus trouver de nouveaux repères, étant délocalisés dans la salle du Pré-Catalan, partagée avec le RCMT. C'est un regret exprimé par le Dr Nichil dans les colonnes de la Dépêche: "Nous jouerons nos matchs au Pré-Catalan pour faire des recettes supérieures à celles que nous réaliserions au stade universitaire. Tous les gars auraient préféré jouer dans leur salle. Mais... D'autre part, la Mairie nous accordant une subvention, verrait d'un mauvais oeil que l'on n'utilise pas ses installations". 

 

 

Reste à régler le problème de planning d'entraînement partagé avec le RCMT pour aborder sereinement ce championnat "franco-américain" tel que le décrit le Dr Nichil.

 

 

En tout cas, ces considérations d'organisation ou de niveau ne troublent absolument pas William Davis, qui impose immédiatement son style à l'équipe, et au championnat. Dynamiteur de défenses, il marque les esprits dès les matchs de préparation, notamment en passant la bagatelle de 57 points à Agen, certes pensionnaire de Nationale II.

 

 

Il va garder la cadence en alimentant la marque pour le TUC de manière régulière, permettant à son équipe de tenir la dragée haute face à des équipes plus réputées comme l'Alsace de Bagnolet, l'ASVEL, Antibes...

Le revers de la médaille, c'est que William Davis devient la cible à abattre à chaque match. S'il est difficile de le contenir d'un point de vue sportif, il n'est pas rare que le jeu se durcisse à son égard, ou que les arbitres ne soient pas toujours équitables. Déjà contre le SA Lyon, en octobre 1968, l'américain du TUC, auteur de 24 points, est sanctionné d'une quatrième faute contestable puis d'une faute technique dans la foulée alors que son équipe est au contact de son adversaire. Le match échappera aux toulousains 74 à 69. Deux semaines plus tard, un incident éclate à Denain: Alors que le l'équipe nordiste et le TUC se livrent un duel farouche (74-74 à la 34ème minute), William Davis (27 points) subit une faute flagrante non sifflée. La rencontre étant déjà acharnée, Davis voit rouge et frappe  M. Himmerberger, l'arbitre du match. Exclu de la rencontre, il ne peut plus apporter à la marque pour contrebalancer les exploits de Jean-Pierre Staelens (32 points) et Jean Degros (28 points). Le TUC s'incline 89-84 alors qu'il tenait le match en mains. 

 

 

Au-delà de cette défaite, les dirigeants toulousains vivent mal l'apprentissage du haut niveau, et menacent de déclarer forfait sur la suite de la saison! Le Dr Nichil confirmera ces propos à la presse: "Si cela continue, nous allons déclarer forfait. Déjà à Lyon les arbitres nous ont volé la victoire et à Denain, voilà que cela recommence. Vous avez vu comme moi que M. Rota a sifflé une troisième faute imaginaire sur Davis. Cela a irrité notre américain. Puis, M. Himmerberger s'est moqué ouvertement de lui en ne sifflant pas une faute denaisienne commise sous son nez. Alors, Davis a eu une réaction que seuls peuvent comprendre ceux qui pratiquent dans des équipes de haute compétition (sic) [...] Comprenez bien que nous autres, au TUC, on joue pour le plaisir et avec l'esprit du fair-play."

Mauvais joueur le Dr Nichil? Peut-être un peu... 

 

 

Le TUC va tout de même finir la saison, son Président reconnaissant  à contrecoeur "qu'il fallait accepter le championnat dit de l'élite avec ses (quelques) qualités et ses (nombreux) défauts. Nous faisons l'apprentissage d'une compétition où quelques privilégiés luttent pour la gloire tandis que les autres se battent pour leur vie."

 

 

Suspendu, William Davis ne sera pas aligné les deux matchs suivants, mais retrouvera très vite son rythme et le chemin des paniers jusqu'à la fin de la saison en passant quelques matchs à plus de 30 et 40 points.

La fin de championnat du TUC présente un double intérêt: les Tucistes vont découvrir la nouvelle salle municipale Léo-Lagrange qui remplacer le Pré-Catalan, vétuste. Et le match inaugural est disputé face à la forte équipe d'Antibes, dont le leader, Jean-Claude Bonato, talonne William Davis au scoring. C'est un duel dans le match pour le titre de meilleur marqueur du championnat qui se dispute là.

 

 

Et malgré la lourde défaite 90 à 65, William Davis domine son adversaire du soir en scorant 41 points contre seulement 11 pour Bonato. Davis enfonce le clou la semaine suivante en passant 34 points à la défense de Vichy avant de clôturer la saison avec 40 points contre l'ASVEL.

 

 

William Davis termine la saison avec une moyenne de 29,8 points par match, devançant Jean-Claude Bonato (26,8) et la gâchette de Denain Jean-Pierre Staelens (26,2).

 

 

Le championnat terminé, William Davis quitte le TUC qui va retrouver la deuxième division, mais sa saison ne s'arrête pas là. Il est en effet retenu au côtés d'autres joueurs comme Henry Fields, Leroy Johnson pour intégrer la sélection "des étrangers de France" qui va servir de sparring partner à l'équipe de France. Quatre rencontres préparatoires aux matchs de qualification pour le championnat d'Europe 1969, au cours desquelles William Davis va encore se montrer prolixe au scoring, avec notamment 27 points lors d'une défaite à Montluçon.

 

 

En 69, William Davis avait vraiment le diable au score...

TOULOUSE UNIVERSITE CLUB

1968-1969

 

 

4 - Serge VALAT - 1,91 m, 19 ans

 

5 - Daniel GRANDJEAN - 1,87 m, 27 ans

 

6 - Jean SIMON - 1,90 m, 27 ans

 

7 - Jacques MARCOUX - 1,70 m, 27 ans

 

8 - André SOUVRE - 1,86 m, 29 ans

 

9 - Bob ANSELLEM - 1,86 m, 19 ans

 

10 - Paul SALMERON - 1,81 m, 30 ans

 

11 - Laurent VIVES - 1,88 m, 30 ans

 

12 - André MICHI - 1,91 m, 31 ans

 

13 - Roland SALMERON - 1,90 m, 26 ans

 

14 - William DAVIS (USA) - 2,01 m, 22 ans

 

15 - Luc MONTECH - 1,78 m, 19 ans

 

 

Debout de gauche à droite: Ansellem, Valat, Michi, Davis, Vives, Souvré, Grandjean

Accroupis de gauche à droite: Galarza, Marcoux, Legname, Paul Salmeron, Montech, Jalama

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29,8 pts

26,8 pts

26,2 pts

William

DAVIS

Jean-Claude

BONATO

Jean-Pierre

STAELENS

Les top-scoreurs de la saison 1968-1969

Alors que le Toulouse Université Club découvre l'élite, le club phare de la ville rose, le RCMT descend en deuxième division, mais avec l'ambition de retrouver aussi vite l'échelon supérieur. L'ossature de l'équipe reste intacte, avec notamment les incontournables Louis Bertorelle et Michel Pfendt.

 

Bien préparé par son entraineur Jo Di Marco, le RCMT ne fera effectivement pas de vieux os en Nationale 2 en dominant la division de la tête et des épaules. Seul l'ASPO Tours va contrarier la marche en avant des toulousains en les restant au coude à coude jusqu'à la dernière journée.


C'est au cours de ce dernier match de la saison que le RCMT va définitivement écarter les tourangeaux de la montée en les battant 61 à 51, avec un Pfendt de gala (26 points). 

 

L'accession en première division assurée, le RCMT va recevoir l'ASVEL en 8ème de la Coupe de France, dans la nouvelle salle Léo Lagrange. A l'occasion de cette rencontre de haut niveau, les toulousains vont écarter les verts de la compétition au terme d'un match engagé, prouvant que leur place se situe parmi l'élite.

Cependant l'embellie sera de courte durée, la saison 1969-1970 sera la dernière du RCMT en première division, qui se mettra quelques années en sommeil pour des raisons financières. 

 

 

 

 

Le classement de la saison 1968-1969

Place Club Gagné Nul Perdu
1 ASVEL 18 0 4
2 JA Vichy 17 0 5
3 Olympique Antibes 16 0 6
4 SCM Le Mans 14 1 7
5 Alsace de Bagnolet 15 0

7

6 SA Lyon 12 0 10
7 ABC Nantes 8 2 12
8 AS Denain 9 0 13
9 Stade Français 7 1 14
10 Caen BC 6 0 16
11 Toulouse UC 5 0 17
12 SI Graffestaden 3 0 19

 

 

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Chassé-croisé toulousain

Le classement de la Nationale II 1968-1969

 

1- RCM Toulouse

2- ASPO Tours

3- Agen

4-Stade Clermontois

5- JSA Bordeaux

6- PTT Limoges

7- SAP Bordeaux

8- Nantes

9- Orléans

10- PTT Clermont

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Toulouse UC

Olympique

Antibes

AS Denain

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Le rythme rapide du basket US oblige les pivots à savoir tout faire.

Et ils le font.

Nous jouerons nos matchs au Pré-Catalan pour faire des recettes supérieures à celles que nous réaliserions au stade universitaire.

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Nous faisons l'apprentissage d'une compétition où quelques privilégiés luttent pour la gloire tandis que les autres se battent pour leur vie.

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William Davis au lay-up avec l'équipe des étrangers de France face à l'équipe de France (INA)

 

William Davis face à Bagnolet (la Dépêche)

 

Les articles de la Dépêche suite au match de Denain

 

TUC-Denain et les balcons du Pré-Catalan (INA)

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DIAPORAMA

Auteur

 

Frank Cambus

 

http://hoopdiary.net